Haro ! Rémy Couture: Artiste de l’horreur est poursuivi comme un vulgaire et dangereux pornographe. Le maquilleur spécialiste en effets spéciaux, âgé de 35 ans, est accusé de corruption de moeurs et de fabrication, possession et distribution de matériel obscène pour des images publiées de 2005 à 2009 sur son site internet InnerDepravity.
Décidément, on mélange tout: la pornographie, l’art, l’horreur … Le procès de Rémy Couture fait la preuve, hors de tout doute raisonnable, qu’on est bien confus et que le flou règne.
Je suis d’avis que le travail de l’artiste-maquilleur Rémy Couture, son objet, c’est l’horreur, pas le porno. Aussi, j’estime que le ministère public a dérapé en tentant d’associer les productions de cet artiste à du matériel porno, à de l’obscénité sexuelle, à de l’incitation à la dépravation sexuelle.
Comprenons-nous bien . L’art macabre du créateur d’effets spéciaux, on aime ou on déteste. Là n’est pas la question. La question ici est Est-ce oui ou non de la pornographie ? Pour ma part, la réponse est nette, claire et sans équivoque : Non. Pourquoi?
L’objet et l’objectif?
L’objet du matériel porno est essentiellement le sexe. Le sexe génital, détaillé, obèse. Son objectif: l’excitation sexuelle. Dans le matériel de Rémy Couture, l’objet est l’horreur et l’objectif est de faire peur et de dégoûter. Évidemment, il peut y avoir du sexe (il y en a partout) mais celui-ci est accessoire et secondaire.
La pornographie est rassurante et lénifiante.
Le scénario pornographique suit une trajectoire constante, sans surprise, qui ne varie à peu près pas. En renvoyant à l’aiguillage bien minuté, à la maîtrise, au déroulement prévu et prévisible, la pornographie est rassurante. Rien dans les productions de Rémy Couture n’est rassurant.
La signature éjaculatoire
De plus en plus, la caractéristique dominante du produit pornographique est la signature éjaculatoire, sorte d’estampe, de griffe, de marquage, toujours bien visible qui dans le visage, qui sur les seins, qui dans le chignon de l’objet d’excitation… Rien de tel dans l’œuvre de Rémy Couture.
Par surcroît, en suivant le procès de ce dernier, j’ai constaté que les gros canons, témoins experts de la poursuite venus du Canada et des États-Unis, ont associé son travail à la pornographie sans jamais définir celle-ci, ce qui est pour le moins aberrant. Je n’ai pas compris cette obsession. C’est comme si la poursuite avait fait le raisonnement, pour le moins innocent, qui suit: voici de l’horrible, la porno est horrible à nos yeux, donc voici de la porno …
Les scènes d’horreur peuvent exciter sexuellement. Les petits oiseaux aussi.
Plusieurs personnes m’ont demandé, via les médias sociaux, si les scènes créées par Rémy Couture pouvaient avoir valeur aphrodisiaque et exciter sexuellement. La réponse : oui. Oui car marginaux et dépravés peuvent être excités sexuellement par des scènes d’horreur . De la même façon que d’autres types de dépravés ou de marginaux peuvent être excités sexuellement par des scènes romantiques, par des fleurs et des petits oiseaux…
Les petits anges à moitié nus ont certes pu exciter des religieux pédophiles. Les petits anges à moitié nus sont-ils pour autant du matériel pornographique? Soyons sérieux.
Le test des 3 questions:
Pour statuer si l’œuvre couturière est pornographique on aurait pu au moins se poser 3 questions:
– L’objectif poursuivi est-il d’exacerber la libido ?
– La mécanique génitale est-elle dominante et prioritaire dans le contenu proposé?
– Le produit est-il estampillé par la signature éjaculatoire ?
La réponse étant négative, on n’a pas affaire ici à de la pornographie. Allez donc savoir pourquoi la Couronne l’a traitée comme telle. Ne trouvait-elle pas d’autres motifs sur lesquels fonder son argumentaire? L’histoire ne le dit pas. Rémy Couture est un artiste de l’horreur. Pas un pornographe. Sans égard à l’oeuvre d’horreurs sur laquelle je ne porte aucun jugement outre ce que j’écris plus haut, j’espère que ce dérapage justicier ne fera pas payer le créateur Rémy Couture pour une « pornographie » (indéfinie) qu’il n’a pas commise.