jocelyne robert

Dans La Presse de samedi dernier, Nathalie Collard signait son billet éditorial "Vieillir au féminin", elle y fait écho aux propos de mon nouveau livre Les femmes vintage ainsi qu'à la sortie de Suzanne Lévesque à l'émission Les francs tireurs. Elle y posait quelques bouleversantes questions qui portent, elles-mêmes, leurs réponses et à l'égard desquelles je poursuis un peu la réflexion.

Surtout dans les médias, on juge les femmes si elles ont recours à la chirurgie esthétique, on les critique lorsqu'elles commencent à montrer des signes de vieillissement. Pourquoi ces commentaires désobligeants proviennent-ils souvent d'autres femmes ? Je crois que, devant son téléviseur, la femme est devant un rêve, son rêve, une projection d'elle-même. On lui a appris à ne jamais être satisfaite d'elle-même, elle est donc intraitable devant l'image que lui renvoie d'elle-même cet écran-miroir.

Est-ce la haine de nous-mêmes que nous projetons ? La peur de nous voir vieillir ? Avons-nous, comme le disent certaines féministes radicales, intériorisé un certain discours sur la beauté ?
Pas besoin d'être féministe radicale pour se rendre compte que nous les femmes, avons intériorisé le discours dominant concernant un idéal féminin de beauté. Il suffit de se regarder soi-même. Ce modèle forcé de beauté est si bien avalé qu'il nous rend dingue lorsque notre image se transforme, se patine, avec le temps.

Que faire pour que les choses changent ? Après la Charte de la diversité corporelle, une charte pour faire la promotion du visage qui trahit les années ? C'est ridicule, évidemment. D'abord, le visage (et le corps) ne "trahissent" pas. Ils traduisent, témoignent, reflètent. Pour le reste, non, je ne trouve pas ta proposition ridicule. Pas plus ridicule que tout ce qu'on s'impose de souffrances et de gaspillage d'énergie pour ressembler à un idéal irréaliste et inaccessible. Je crois que les standards culturels de beauté et de jeunesse éternelle dont nous sommes gavées nous éloignent de la vie, de notre propre vie.

Mais alors, comment encourager la diversité ? Oser montrer son visage marqué par le temps ? Oui. Se rebiffer. Résister. Apprendre aux autres, en témoignant, qu'un visage buriné d'histoires est bien plus beau qu'un masque livide..

Accepter que la beauté n'est pas nécessairement synonyme de jeunesse ? Accepter oui et puis, encore en témoigner. En être la preuve vivante. En tout, dans la vie, la beauté est multiple, pourquoi pas chez les humains ? La perception de la beauté est une construction culturelle. Tout ce qui se construit se déconstruit. Mais rien ne se fait sans solidarité, sans adhésion. Le monde occidental est largement constitué de personnes de 50 ans et plus. C'est un précédent historique. La balle est dans leur camp. Dans mon camp. C'est ce qui a motivé l'écriture des Femmes vintage.

Le combat est loin d'être gagné. C'est vrai. Mais il est prouvé que les victoires résident dans l'attitude de départ, dans la confiance, dans l'attitude gagnante…
Merci Nathalie Collard pour ta contribution.

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Publié dans : Femmes, Médias et Actualités
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2 commentaires

  • Ping de Parles-en aux experts » Je souffre qu’on me considère comme homme, mais ne me sens pas légitime en tant que femme… — 26 mai 2015 à 20 h 24 min

    […] parfois l’impression qu’il est interdit d’accumuler les années! Je vous invite à lire Jocelyne Robert, sexologue québécoise, à ce sujet. De votre côté, qu’est-ce qui est le plus inquiétant […]

  • Commentaire de Marie France — 19 mai 2010 à 10 h 27 min

    Je viens de fêter mes 50 ans. Je dois dire que cela est beaucoup plus agréable pour moi que d’avoir fêter mes 40 ans. Cela m’excite. Il y a tellement de choses intéressantes à faire. Je me sens libérée de toutes contraintes et je me permets de faire seulement ce qui me plaît. Si je décide de faire quelque chose je le fais et advienne que pourra. Les autres non pas à approuver mes choix de vie. Je crois que la peur de vieillir est normale car elle amène surtout la peur de maladies dégénérescentes, de cancers divers, de perte d’autonomie, de plein de douleurs, de solitude et d’isolement. J’ai accompagné ma mère de nombreuses années dans son cheminement de vieillesse et j’ai beaucoup appris à son contact. Elle me disait que la période la plus difficile pour elle a été après 80 ans. Elle m’a souvent dit à la fin de sa vie qu’elle était tannée d’être vieille. Grâce à elle j’ai côtoyer beaucoup de femmes âgées et plusieurs d’entre elles avaient toujours 20 ans dans la tête et le coeur malgré leur âge physique. Il ne faut pas s’arrêter à l’apparence des gens et à nos préjugés.
    Pour l’instant, je ne recourai pas à la chirurgie plastique mais comme je suis libre de tout interdit il est possible qu’un j’y ai recours si cela me le dit. Je n’ai pas peur de mes rides. J’en suis fière. Cependant jamais je ne sortirais de chez moi sans maquillage. Même à la maison je ne me présente jamais sans maquillage devant mes invités. Seuls les intimes mes voient au naturel. C’est un privilège car ils ont su gagner ma confiance. Mon maquillage est mon tchador…

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