jocelyne robert

Encore un paradoxe de nos sociétés: de toutes les professions, j'oserais dire que celle de sexologue est à la fois la plus aimante et la plus ma-aimée.

Le simple fait qu’on se demande encore qui fera l’éducation sexuelle scolaire (si elle finit par advenir) est un total non-sens.  Et cela montre bien combien cette profession, dans une société  qui distille du « cul mur à mur », est pestiférée.

Se demande-t-on qui aller voir si on a mal au ventre ?  Non, on va chez le médecin.  Et on appelle un architecte pour concevoir les plans de sa maison, un avocat pour un problème juridique , un comptable pour ses impôts…

Le fait  que tout un chacun s’improvise spécialiste en éducation sexuelle, sexologue ou éducateur à la sexualité montre qu’on sous-évalue cette formation professionnelle et qu’on sous-estime le champ de compétence des vrais professionnels de la sexologie. On ignore les énormes dégâts causés par les pseudo-sexologues, pseudo-éducateurs à la  sexualité.  Sérieusement, je crois avoir passé la moitié de ma carrière à réparer les pots cassés par d’autres !Personne ne confierait sa santé au premier venu qui a lu un livre ou deux de médecine! Pas plus que son portefeuille à une personne qui prétend savoir compter !

Que d’incohérence et d’incongruence de la part de nos décideurs! Comment l’UQAM peut-elle  continuer à former à la pelletée des sexologues alors que les milieux dans lesquels ils pourraient travailler leur ferment les portes ? Comme l’État peut-il continuer à subventionner ces lieux de formation?  Comment a-t-on pu, il y a 25 ans,  mettre au menu scolaire un formidable programme d’éducation à la sexualité sans jamais fournir les ressources nécessaires qui auraient permis de le rendre efficace ? Puis, le retirer sans se demander pourquoi il n'avait pas fonctionné comme il aurait pu et dû?

J’ai  récemment signé la lettre du Collectif de sexologues qui demande à la Ministre de l’Éducation d’intégrer les sexologues dans la mise en place de l’éducation sexuelle scolaire.  J’ai souri, en la signant, car je me suis rappelé que, jeune sexologue, je m’étais ralliée à une démarche en tous points semblable. L’histoire se répète: c’était il y a 30 ans.

Ne laissons pas, cette fois-ci, l’éducation sexuelle à l’école (promise par la ministre )se faire sans eux et elles.  Exigeons que l'état québécois ait la cohérence de reconnaître « ses » professionnels de la sexologie, en leur accordant la place qui leur revient dans les institutions qui pourraient s’enrichir de leurs compétences.

Ce ne sont pas des raisons « corporatistes » mais humanistes qui motivent ma position. C’est le bien-être de nos enfants, de nos adolescents, des adultes de demain qui  nous indique clairement de  « donner de la job » aux pédagogues de la sexualité.  N’oublions pas qu’en bout de ligne, une éducation sexuelle lumineuse et bien prodiguée permettra de faire des économies substantielles  ( its, ivg, thérapies, problèmes d’estime de soi, dépression affective, délinquance sexuelle, violence sexuelle, grossesses involontaires etc).  Sans compter, qu’elle videra les bureaux des sexologues cliniciens 🙂

Et puis, l’éducation sexuelle, faut-il le rappeler, est aussi une éducation à l'affectivité.  Elle ne professe pas le sexe, elle proclame la vie. La fierté d’être garçon ou fille.  La liberté.  La dignité. En lien avec ce billet, lire, vous pouvez lire sur ce blogue "Profession honteuse"

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Publié dans : Culture et Société, Sexologie
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7 commentaires

  • Ping de Belle gang de sexologuophobes et de sexologistes ! - Jocelyne Robert — 16 septembre 2012 à 11 h 40 min

    […] C’est dans ce contexte que j'ai éprouvé le besoin de revenir sur cette question de la sexologuophobie et du sexologisme sur laquelle j’ai déjà écrit. Il m’a semblé que le […]

  • Commentaire de Jocelyne Robert — 4 mars 2012 à 8 h 11 min

    Karine, Dans l'ensemble, je crois qur vous intervenez comme il se doit. Vous avez raison de croire que le "frottement chaise haute" n'est pas en soi inquiétant. Et s'il n'est pas observé à la maison, c'est peut-être simplement parce qu'il n'y a pas d'effet d'entraînement ou d'imitation comme à la garderie. Pour le petit dont vous parlez spécifiquement, qui semble se masturber de façon plus compulsive, il faut continuer à porter attention à son niveau d'anxiété. Sans sauter aux conclusions hâtives, cet enfant a peut-être besoin d'une aide plus spécifique . Discutez-en équipe et, au besoin, parlez-en aux parents ou aux personnes responsables.

  • Commentaire de Jocelyne Robert — 1 mars 2012 à 19 h 12 min

    Je vous reviens Karine, dès que j’ai un instant de grâce !

  • Commentaire de karine — 1 mars 2012 à 13 h 02 min

    Bonjour madame Robert,

    je suis agente dans un CPE et des éducatrices me questionnent beaucoup sur la façon d’intervenir auprès des enfants qui se masturbe. Je ne parle pas ici des cas plus légers où les enfants le font lors de la sieste sur leur matelas.

    C’est que cette année, nous avons un enfant qui a une situation familiale particulière qui amène des périodes d’angoisses et de stress.

    L’observation qui a été faite auprès de l’enfant note que l’enfant préfère se masturber à plusieurs moments de la journée plutôt que de jouer. De plus, certains autres enfants l’observent et tentent parfois de l’imiter. Nous essayons de lui changer les idées, de réorienter son intérêt. De verbaliser pour voir si quelque chose la dérange, de faire des jeux actifs pour permetttre au stress de tomber autrement. Nous lui avons aussi permis de le faire dans la salle de bain en expliquant que c’est correcte de le faire à cet endroit plutôt que dans le local avec tous les autres enfants. Cet enfant à 4 ans et le geste de la masturbation semble plutôt associer à un besoin de se détendre et de faire sortir le stress.

    Est-ce que nous intervenons bien avec cet enfant pour l’aider?

    L’autre point et qu’il est observé dans nos installation que chaque année, il y a quelques bébés qui se masturbe lorsqu’ils sont assis dans les chaises-hautes. Les éducatrices en parlent avec les parents qui eux disent ne pas observer cela à la maison.

    De mon côté, je ne vois pas de problème avec cela et je ne sais pas si c’est important de le mentionner au parent. J’aimerais avoir votre avis avant d’en rediscuter lors de nos réunions de travail.

    Merci

    Karine

  • Commentaire de Renée — 22 janvier 2011 à 10 h 04 min

    Éloge de la polyvalence.
    Avec le temps…combien? Les spécialistes sont devenus des polyvalents. Des professeurs de dessins enseignaient l’histoire, des spécialistes en marketing s’improvisaint en philosophie…les matières ingrates. Je vous parle du lieu où j’enseignais, un Collège international où enseigner en français ou en anglais devenait la norme. En autant que l’on ait pas à écrire, que les horaires soient bouclés.
    Catéchèse, arts plastiques, éducation physique…même manuel d’exercices. Les objectifs sont vus par compétences…voir, être « capable ». Capable de comprendre que l’histoire débute avec sa naissance, que de se « laver les mains sauvent des vies ».

  • Ping de Tweets that mention Sexologue: la profession mal-aimée | Les Femmes Vintage - Le blogue de Jocelyne Robert -- Topsy.com — 21 janvier 2011 à 20 h 25 min

    […] This post was mentioned on Twitter by Jocelyne Robert and Jocelyne Robert, Jocelyne Robert. Jocelyne Robert said: Le fait qu'on se demande encore qui devrait faire l'éducation sexuelle à l'école est un chef d'oeuvre d'incohérence ☞ http://bit.ly/e0t6MY […]

  • Commentaire de toutautourdemoi — 21 janvier 2011 à 19 h 31 min

    Étant maman de 3 garçons ados, je fais mon bout de chemin et le papa aussi en ce qui concerne l’éducation sexuelle. Mais pour bien des gens, y a un malaise…je comprends pas…le sexe est partout et tout est véhiculé souvent tout croche…Ce serait tellement plus sain pour nos adolescents d’avoir cette ressource à l’école, pour avoir de l’information, réconfort, compréhension, enseignements. Mon plus vieux a eu la chance d’avoir en secondaire 3 une prof de science ouverte, avec beaucoup d’écoute et de conseils, d’info, et qui a su répondre à TOUTES les questions des jeunes. Je crois que pour elle, c’était très important. Mais c’est plutôt rare de rencontrer ce genre de professeur comme ça. Je me souviens de mon gars revenir à la maison avec une foule de choses à me raconter, à me dire et à m’enseigner! Et sans gêne! C’est donc dire que c’est vraiment nécessaire comme ressource.Surtout que le sexe est tellement tout partout, que nos jeunes ne semblent plus savoir comment faire la part des choses dans tout ça. Et même les adultes aussi je crois.

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