jocelyne robert

Ce billet a été repris par le Huffington Post Québec le 17 juin 2012

Propos sur la lâcheté, la peur, la crise sociale et les médias sociaux…

Ces temps-ci,  avec la crise sociale qui sévit au Québec, avec le clivage de plus en plus net entre les parties qui s’affrontent, l’occasion nous est donnée d’observer des comportements et attitudes vraiment déplorables. La lâcheté en est.

Sur les médias sociaux, et particulièrement sur Twitter, j’ai été consternée ces derniers mois de lire autant de  commentaires accusateurs, diffamatoires, gluants, putrides, haineux, parfois carrément criminels, émis sous le veule couvert de l’anonymat.

Que dit la religion de la lâcheté?

La lâcheté n’est pas un péché. Elle devrait, à mon avis, être LE péché capital primordial, bien devant la colère, l’orgueil, l’envie, l’impureté, la paresse, la gourmandise et l’avarice. Et si elle n’est pas un péché capital, elle est encore moins, aux yeux du catholicisme, un péché mortel ( vous savez, celui censé nous envoyer droit en enfer si on meurt sans s’être confessé et avoir obtenu l’absolution…)

Je me suis souvent demandé pourquoi les commandements de Dieu et des Églises ont été et sont encore si tolérants à l’endroit de la lâcheté.  Pour mieux pardonner, couvrir, défendre ses prêtres, membres et ouailles…?  Je serais étonnée que Dieux considèrent la lâcheté comme ingrédient normal, intrinsèque et fondateur de l'être humain!

Que dit le droit de la lâcheté?

En droit, la lâcheté est pour ainsi dire inexistante. Être lâche n'est pas un crime punissable par la loi. On  ne peut pas accuser, porter plainte, poursuivre quelqu’un, demander le divorce  pour motif de  lâcheté. Si certains actes perçus comme des signes de lâcheté peuvent être considérés comme délictueux ou criminels, la lâcheté, en soi, n’est pas une faute, juridiquement parlant. 

Votre voisin est un lâche qui a abandonné son père , gravement malade et dans le besoin ? Il  pourra être accusé de « non assistance à personne en danger » mais pas de lâcheté.

La désertion, la délation, ou le refus de combattre sont aussi estimés comme des gestes de lâcheté.  Les  États-Unis, la Suisse et d’autres pays qui parlent de la lâcheté dans leur littérature juridique ou pénale réfèrent invariablement à l’idée de « se cacher » , de ne pas assumer…

Libérez-nous de la lâcheté

La lâcheté est sans doute la tare pour laquelle je ne parviens pas à avoir la moindre compassion ou tolérance. Tant et si bien que, moi qui n’avais bloqué que 2 personnes en 3 ans de présence sur Twitter, j’ai dû en bloquer une vingtaine ces derniers temps. Pourquoi? Parce que 1) je juge inutile et malsaine toute discussion avec ceux qui ne parlent pas à visage découvert lorsqu’ils injurient ou attaquent et 2) je refuse que ces tweets contaminent mon fil.  Aussi, j’avais répertorié une dizaine de gazouillis puants de peur et de mépris anonymes que je voulais mettre ici et je me suis ravisée. Trop de publicité gonfle l’orgueil des lâches.

▪ L’expression lâcheté a donné le verbe lâcher, car celui qui lâche laisse tomber, abandonne, fuit…
▪ Le contraire de la lâcheté est la bravoure, le courage. Pour moi le contraire de la lâcheté est la dignité, l'audace et la transparence.
▪ Synonymes de lâcheté:  pleutrerie, pusillanimité, couardise, poltronnerie, veulerie, mollesse, hypocrisie, indignité, vilenie…
▪ Synonymes de lâche : couille molle (un peu sexiste mais bon…) , capitulard, déserteur, traître, trouillard, hypocrite, pleutre, poltron

J’estime que la lâcheté est le pire des défauts, le plus honteux de tous les vices.

Comme je l’évoquais plus haut, plus encore en situation de crise et d'affrontements sur des questions sociales et politiques fondamentales, la lâcheté pollue les médias sociaux. On s’y cache derrière l’avatar, le pseudonyme, le moineau ou la tête d’œuf pour vomir des propos infâmes, méprisants diffamants…  On s’y permet d’être lâche de chez Lâche, d’être celui ou celle qui, à visage découvert, ne pourrait que ramper, reculer, s’écraser, chier dans son froc…

Si vous souhaitez cultiver la tolérance à l’égard des lâches de ce monde, rappelez vous ceci : ce sont des poltrons que la peur domine. Ils trahissent, se camouflent, parce qu’ils ont la trouille.

 

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Publié dans : Culture et Société, Médias et Actualités, Médias sociaux, Opinion, Politique, Sentiments et Émotions, Web
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12 commentaires

  • Commentaire de Evelyne Abitbol — 19 juin 2012 à 21 h 17 min

    Merci Jocelyne pour ce texte. J’ai commencé à écrire un texte sur le même sujet, vous m’avez devancée et j’avoue que je n’aurai pas mieux dit.
    J’ai une sainte horreur des insultes et des lâches.

  • Commentaire de mildred. — 14 juin 2012 à 19 h 42 min

    J’aime beaucoup le dernier post de Renée qui cite Bernanos,je pense comme ça moi aussi,sauf que je me sents bien seule dans mon combat pour la vérité,et la justice sociale a besoin de beaucoup de renfort pour convaincre la majorité et vaincre la lâcheté.

  • Commentaire de Renée — 14 juin 2012 à 10 h 33 min

    « La force de l’indignation ». Titre du no de mars 2011 de la revue (Relations)
    Jean-Claude Ravet citant Bernanos

    « On méprise d’en bas, on ne saurait s’indigner qu’à partir d’une certaine hauteur où il faut se maintenir coûte que coûte, sauf à rougir de soi. Qui s’indigne ne peut échapper à la contrainte torturante de l’examen particulier dont la conclusion lui sera toujours défavorable puisque l’indignation n’est rien si elle n’est le cri spontané d’une conscience outragée par le scandale. »

    Bernanos, « Les enfants humiliés »

  • Commentaire de Jocelyne Robert — 13 juin 2012 à 21 h 28 min

    😉 Je ne sais pas si j’ai sa bénédiction. Je crois en cet être d’amour qu’il a été mais je ne crois pas aux religions…
    Un des plus beaux livres que j’ai lus, il y a longtemps : Jésus, homme libre. J’y reviendrai, là, je suis dehors au bord du lac et je me fais bouffer par les moustiques!

  • Commentaire de Mario Bellavance — 13 juin 2012 à 20 h 34 min

    Je visite votre blogue Mme Robert, depuis plus d’un an, depuis en fait, le mouvement d’opposition à la venue de Bertrand Cantat au Québec. Une opposition qui s’est soldée par un succès… Depuis je partage avec vous votre indignation contre la violence faite aux femmes et aux enfants, de même que la violence plus récente de la police contre les jeunes du Québec… Présente comme vous l’êtes dans l’espace médiatique de même que dans les média sociaux, je comprends votre colère contre des personnes, des lâches comme vous dites, qui soutiennent et alimentent toute cette violence dans l’anonymat du web.
    J’aimerais cependant apporter une clarification concernant votre questionnement envers le péché de la lâcheté. En l’an 2000, je venais de rédiger un livre portant sur les maisons ancestrales de Saint-Joseph-de-Sorel quand je fus conduit à l’église Christ Church de Sorel-Tracy… Je me mis à fréquenter la célébration du dimanche et je m’étonnai de cette formulation que nous récitions collectivement au début de l’assemblée : « Mon Dieu, je m’accuse des péchés que j’ai commis en pensées, en paroles, par actions et par omissions. » Depuis, je médite régulièrement cette phrase… Quand une personne écrit sur le web des paroles qu’elle sait fausses et qui font du tort à d’autres, n’est-ce pas un péché en vertu de cette reconnaissance publique de fautes? N’est-ce pas la lâcheté que vous dénoncez?
    Par ailleurs, je constate le mutisme de l’Église catholique en rapport avec la crise sociale actuelle au Québec et je comprends tout à fait la confusion que plusieurs comme vous-même pouvez avoir sur la religion. Je vous ferai remarquer cependant que Jésus était lui-même tout sauf un lâche. Je rappellerai à cet effet, son indignation et sa colère contre la présence des voleurs dans le temple. À ce titre, votre propre colère contre les lâches sur le web ressemble étrangement à la sienne. Gageons que vous avez sa bénédiction!!!

  • Commentaire de Renée — 13 juin 2012 à 10 h 54 min

    Intéressant ces derniers commentaires.
    http://www.egs.edu/faculty/jean-baudrillard/articles/ecran-total/

    Cet article que j’ai lu m’apparaît approprié.
    De Jean Baudrillard

    Youk

  • Commentaire de Jocelyne Robert — 13 juin 2012 à 10 h 42 min

    En tout cas, votre commentaire fait réfléchir…

  • Commentaire de monia — 13 juin 2012 à 10 h 37 min

    Bonjour,
    J’adore cet article pour la réflexion qu’elle amène à notre cerveau en passant par notre cœur. Attention, je suis une accro de twitter, alors mes propos sont quelque peu arbitraires.
    Je suis bien malheureusement une twitteuse cachée derrière un avatar. Pas par choix, mais par obligation. Je n’ai plus le droit légalement de donner mon opinion alors, je suis devenue une belligérante, une criminelle d’opinion. Je rampe devant le pouvoir en place. On m’a dépossédée, mais j’ai encore une voix, toute petite voix à peine audible, qui veut crier et dire que je suis contre. Contre ce système qui veut nous avaler. Contre ces lois qui veulent nous asservir. Contre ce pouvoir qui nous déshumanise. Alors j’utilise des symboles (carré rouge, carré noir, carré blanc, loi78 rayé d’un trait, je suis personnifiée par un animal de fiction tellement naïf, gentil, « charmant mais malchanceux ». Je trouve qu’il me ressemble ces temps-ci. Je me cache derrière lui et mes carrés. J’ai peur. Peur du pouvoir du gouvernement, peur que mes paroles et que mes idées soient retournées contre moi. Cette peur je ne l’invente pas, je l’ai vécu. Échaudée, je me méfie.
    J’essaie de toujours être respectueuse lorsque je lance des twits dans l’univers virtuel, mais parfois, je l’avoue, je me fâche et je riposte. Puis, je me sens excessivement mal. Alors, comme une être violentée, je prends mon courage à deux mains, j’ouvre le profil de l’agresseur et je le bloque. Tout cela dans un souffle. Ensuite, je ferme twitter, je laisse simplement échofon (c’est plus fort que moi) J’observe du coin de l’oeil ce que les 150 personnes que je suis disent. J’ai confiance en eux. Ces twitteurs sont respectueux (presque toujours). Quand ils ne le sont pas, c’est qu’il se passe quelque chose.
    Il m’est arrivée d’avertir de nouveaux twitteurs(euses)contre les provocateurs. Chaque fois je disais : « Laisse-le faire, c’est un troll. Il ne cherche qu’à t’attaquer personnellement. Bloque-le c’est préférable. »
    Je pense que je suis lâche, je me sens lâche. Mais, on dirait que la société nous dresse ainsi. Sois lâche et tais-toi! Sois lâche et cache-toi! C’est quand même incroyable. Je continue d’y réfléchir…

  • Commentaire de Dan Cecala — 13 juin 2012 à 9 h 14 min

    Ce message s’adresse à tout le monde, peu importe vos allegéances.

    Les réseaux sociaux se sont donné l’incroyable objectif et ont réussi à mettre en contact des vastes majorités des couches de la population locale et même mondiale. Ils ont voulu donner une voix à tous ceux qui « n’avaient » pas ce droit en société, ou qui ne l’exercaient pas, vu des personnalités moins dominantes ou plus introverties.

    Malheureusement l’option qui nous permette de s’exprimer sous le couvert de l’anonymat permet aux internautes, blogueurs, « twiteux » de se dissocier des mots, des menaces gratuites, des idées appuyées. Beaucoup d’entre eux semblent s’identifier plus à leurs avatars qu’à leur personne lorsqu’ils contribuent à cette riche « littérature » du virtuel. Pour reprendre le terme à la mode, cette liberté totale est un vecteur de la « polarisation » actuelle de la crise au Québec. Très peu de gens recherchent des solutions viables ou même des arguments logiques lors des discussions. De part et d’autre les accusations, les insultes, les comparaisons « ad Hitlerium » fusent. Les bases de la rationalité, des vérités historiques, du sens de l’humour sont bafouées de tous les bords sans véritables connaissances de cause. Les gens aux idées de droite accusent « les rouges » d’être des fascistes, antagoniste en soi il me semble, de casseurs, d’anarchistes. Parmi les « rouges » on traite la police de SSPVM, toute personne aux idées plus à droite, de raciste, islamophobe et j’en passe. Les réseaux sociaux permettent dans souvent des cas une exagération totale des situations et un relâchement total des contraintes morales, intellectuelles et de civisme. Beaucoup d’écrits sur les babillards virtuels ne font preuve que d’une émotivité exacerbée, d’un absurde palpable et souvent d’un incroyable nombrilisme des couches de la société du moi.

    Si les réseaux sociaux ont fait un contrepoids non-négligeable aux informations soigneusement « filtrées » par les médias de masse, ils nuisent aussi au mouvement étudiant dont la cause défendue est noble. Cette cause première de la grève étudiante semble noyée derrière l’explosion géométrique d’accusations, de faits relatés, d’images et vidéos inquiétants.

    Pour ce qui est des lâches, ils ne font que mettre de l’huile sur le feu. Est-ce qu’un terme comme « agitateurs virtuels » existe pour remplacer les manifestants de salon et les adeptes de la droite nationaliste? Souvent les messages les plus enflammés « révolutionnaires » et « contre-révolutionnaires » sont le fruit de gens que vous ne verrez jamais lors des manifestations et même des élections. Des gens qui se terrent devant leur ordi. qui ne sortent pas pour prendre le véritable pouls de la rue. Et croyez-moi si les choses se corsent encore plus, ils hibernerons encore plus et seront les premiers a défendre le statu-quo. Je crois que l’autre terme à la mode c’est « majorité silencieuse ». La liberté d’expression totale du web, fait le jeu des dirigeants car elle encourage et magnifie les divisions sociales. Si vous voulez avoir une vraie idée de l’ampleur du mouvement, de la solidarité, de la brutalité policière, des fouilles aléatoires, allez dans la rue. Et surtout de grâce ne prenez pas tout ce qui se dit sur Internet pour des vérités absolues, c’est une dérive totalitaire aussi dangereuse que certaines interventions policières lors du GP de F-1.

  • Commentaire de Lise Roy — 13 juin 2012 à 6 h 36 min

    Bravo Jocelyne! Voilà également où j’en suis. Mes présences sur twitter se font plus rares en ce moment puisqu’il y est devenu impossible d’émettre le moindre commentaires n’ayant pas trait à la situation sociale actuelle. Pis encore, comme si le fait de « vouloir » parler d’autre chose faisait de nous des êtres méprisables. Le conflit prend toute la place dans nos vies, divise les familles, les amis… Et comme vous le dites si bien, la lâcheté pollue les médias sociaux.

  • Commentaire de Renée — 12 juin 2012 à 18 h 22 min

    J’ai lâché
    J’ai lâché ma job ou ils m’ont poussé(e)?

    J’ai lâché mon chum ou il s’est oublié?
    J’ai lâché la prise et ai remis le poisson à l’eau?
    J’ai lâché mes études…trop compliqué ou trop cher

    Je me lasse de lâcher et devient lente.
    Cette lenteur m’amène à respirer différemment.

    « Lâche pas la patate »
    Youk

  • Commentaire de Violette Provencher — 12 juin 2012 à 17 h 18 min

    Merci Jocelyne pour votre aisance et facilité à écrire ce que plusieurs dont moi pensent de la lâcheté.

    J’ai dû moi aussi dès aujourd’hui, prendre une distance avec une amie qui méprise mes opinions avec sarcasme sans vraiment avoir le courage de m’affronter de face.

    Je vous suis sur Twitter. Bonne journée !

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